MasukELENAJe suis en train de m’effondrer. Mes mains s’accrochent à ses épaules, mes doigts s’enfonçant dans sa peau. Ma tête tombe en arrière, un long gémissement continu s’échappant de mes lèvres.— C’est ça, encourage-t-il, sa voix vibrante contre ma chair. Donne-le-moi. Donne-moi tout.Et je le fais. La vague monte, inexorable, chauffée à blanc par des semaines de tension partagée, de regards chargés lors de réunions, de doigts qui se frôlent en passant des dossiers. Elle se brise avec une violence qui me déracine. Je crie, mon corps se tordant, secoué par des spasmes qu’il prolonge, adoucit, savoure jusqu’à la dernière vague.Quand je rouvre les yeux, tremblante, vidée, il est toujours là, me regardant avec une expression de triomphe tendre et sauvage. Sa bouche et son menton sont luisants. Il se lève, son propre désir dur et impérieux entre nous.Il me prend dans ses bras, me soulève sans effort et me pose sur le bord du bureau. Les papiers froissent sous moi. Il écarte mes jambes e
ELENATrois mois plus tard.Le loft ne sent plus le vernis et le pouvoir froid. Il sent le café fort, les papiers entassés, la cire d’abeille d’une bougie que j’ai allumée sur le bureau , notre bureau et l’odeur de lui, de nous, imprégnée dans chaque surface.Je suis penchée sur les derniers contrats de Sterling Dynamics, ceux que Kai m’a donnés sans filtre. La lumière du soir coule à travers la verrière, dorant les colonnes de chiffres, les clauses dissimulées que je surligne en rouge. Mon crayon gratte le papier, un son vif dans le silence concentré.Soudain, une ombre me coupe la lumière.Je ne l’ai pas entendu arriver. Il a cette façon féline de se déplacer, même pieds nus sur le béton poli. Je lève les yeux.Kai est appuyé contre le bord du bureau, une simple serviette enroulée à sa taille. Ses cheveux sont encore mouillés, sombres, des gouttes perlant sur ses épaules, glissant le long du sillon de sa colonne vertébrale, disparaissant dans le tissu éponge. Il a passé la journée à
ELENA Il plonge son regard dans le mien, désarmé, furieux.— Tu sais maintenant que je ne suis pas un monstre complet. Tu sais que j’ai une ligne, même tordue. Tu sais que je suis capable de sacrifier un avantage stratégique pour… des pions. Cette connaissance, dans tes mains, est plus destructrice qu’un millier d’articles. Parce qu’elle est vraie. Et parce que tu l’as vue par toi-même, pas dans des documents, mais en moi.Je le regarde, le cerveau en ébullition. La pièce du puzzle ultime se met en place. Sa froideur, son contrôle, ne sont pas une absence d’humanité, mais son enfermement. Il se protège, lui et ceux qui dépendent de lui, dans une prison de pouvoir. Et je viens d’en briser la serrure.— Pourquoi me le dis-tu ? Pourquoi me donner cette arme ?Un sourire triste, presque tendre, flotte sur ses lèvres.— Parce qu’une guerre ne peut se faire qu’entre égaux. Et hier soir, tu m’as hissée à ton niveau. Tu es dans le système, Elena. Je ne peux plus te traiter comme une menace e
ELENALe lendemain, l’air du jardin japonais est saturé d’une tension nouvelle. Chaque pierre, chaque érable, chaque mouvement de l’eau semble porter la mémoire de la veille. Je marche le long du chemin de gravier, mon corps encore empreint de la sensation de Kai, chaque muscle un doux rappel douloureux de notre collision. Je porte une robe simple, en soie noire. Une armure légère contre ce qui va venir. Ou peut-être un drapeau de reddition.Kai m’attend près du pont de bois, tourné vers l’étang aux carpes koï. Il est vêtu d’un costume gris anthracite, impeccable, mais ses yeux, quand il se retourne, n’ont rien de net. Ce sont des ciels d’après-tempête, gris et tourmentés, parcourus d’éclairs d’une possession toujours vive. Il ne sourit pas. Il me dévore des yeux, lentement, comme s’il recalculait chaque courbe qu’il a explorée, chaque son qu’il m’a arraché.— Tu es en retard.Sa voix est plus grave que d’habitude, raclée par des souvenirs de grognements et de murmures. Je m’arrête à
Elena Il attrapa le bord de mon pull et, d’un geste impatient, me le retira par-dessus la tête. L’air frais du loft me mordit la peau, aussitôt remplacé par la chaleur de son regard. Il me détailla, des yeux sombres et agrandis, à la bouche gonflée, jusqu’aux courbes que dissimulaient encore mon soutien-gorge et mon jean. Son expression était de l’ordre du rapt, d’une faim assouvie enfin en vue.— Tu es exactement comme dans mes fantasmes, murmura-t-il. En pire. Parce que tu es réelle.Il défit la fermeture de mon jean d’une main experte, le faisant glisser le long de mes jambes avec l’autre. Je restais assise sur le bureau, en petite tenue, vulnérable et puissante à la fois sous son regard dévorant. Ses mains encerclèrent mes chevilles, puis remontèrent le long de mes mollets, mes genoux, mes cuisses, avec une lenteur délibérée qui me fit frémir de tout mon être.— Kai…, haletai-je, ne sachant plus si c’était une supplique ou un ordre.Il s’agenouilla soudain entre mes jambes écarté
Elena La voiture glissait dans les rues de la ville comme un requin dans des eaux nocturnes, feutrée, puissante. Le silence à l’intérieur n’était pas un vide, mais une substance palpable, chargée de tout ce qui venait de se passer et de tout ce qui se préparait. Kai conduisait d’une main négligente, l’autre posée sur le levier de vitesse, son avant-bras tendu, une carte géographique de veines sous la peau pâle.Je regardais défiler les lumières, incapables de pénétrer la vitre teintée. Mon corps était un champ de bataille post-conflit : chaque point où il m’avait touchée – les hanches, la nuque, la bouche – palpitait doucement, envoyant des ondes de rémanence vers mon centre. J’étais assise sur mes mains pour les empêcher de trembler. Ou de se porter à lui.— Où allons-nous ? demandai-je, ma voix trop calme pour être vraie.— Quelque part où on ne nous trouvera pas. Où tu ne pourras pas fuir.— Je ne fuis pas. Je me retire stratégiquement.Il tourna légèrement la tête, un éclat bleu