Quelques semaines plus tôt.
#Alaric
L'appel urgent d'Angel m'a pris au dépourvu, me forçant à suspendre tout ce que je faisais et à revenir en hâte au domaine. Il avait été vague au téléphone, me laissant dans le flou sur la raison de cette urgence. Mais à l'instant où je franchis le seuil de la porte, je la vois : Serenity, assise sur le divan, le regard lointain, figée dans une froideur qui n'augure rien de bon.
__ Darling ?
Ma main se pose sur son épaule, mais elle la repousse d'un geste sec, se levant pour s'éloigner de moi.
__ Je suis contente que tu sois là.
Sa voix n'est qu'une brume glacée, et c'est là que je réalise. Ce n'est pas Angel qui est la source de cette urgence. C'est elle.
__ Quel est le problème ?
__ Je veux divorcer, Alaric.
Mes pensées se figent. Je crois avoir mal entendu. Il me faut quelques secondes pour assimiler ses mots.
__ Pardon ?
__ Je veux qu'on se sépare.
Je masque instantanément ma réaction, mes traits devenant impénétrables. Serenity, ma plus grande faiblesse, l'achille de mon talon. Pourquoi elle ? Pourquoi maintenant ?
__ Pourquoi ? Qu'est-ce qui se passe ?
__ Je ne respire plus ici. Je suffoque. J'ai besoin d'une pause, d'une vraie pause… Un an.
Un an… La nouvelle me frappe comme un coup de poing.
__ Divorce, pause, il faut choisir l'un ou l'autre...
Je me laisse tomber sur le canapé, les bras croisés, le regard fixé sur elle, cherchant à comprendre.
__ On s'est enfermés dans une routine, Alaric. Nos vies se sont imbriquées au point d'en devenir étouffantes. Je veux de l'air, je veux respirer...
Je reste silencieux un moment, mes pensées partant dans toutes les directions.
__ Tu veux réellement ça ?
Elle me tend alors des papiers qu'elle a déjà signés, une formalité, comme si tout était déjà décidé. Mon cœur rate un battement.
__ Et si je refuse ?
Je m'avance brusquement, la distance entre nous se réduisant d'un coup. Elle me défie du regard, sans un soupçon de crainte, bien qu’elle soit la seule capable de me tenir tête ainsi.
__ J'ai trouvé une "remplaçante". Un an. Ce sera secret. Elle prendra ma place et tout le monde croira que je suis encore là. Quand je reviendrai, ce sera fini.
Elle a tout prévu. Chaque détail. Elle a même prévu cette femme. Mon esprit bouillonne, mais je garde mon calme. C'est elle qui dirige ce jeu.
Je me rapproche encore, presque à l'instant où je pourrais l'effleurer, mes mains se posant sur sa taille, ma respiration se faisant plus chaude. Je la laisse sentir ma présence, le désir créant une tension palpable.
__ Tu penses vraiment qu'elle pourra être comme toi ?
Je murmure ces mots, enfonçant mes doigts sous sa robe, avec l'intention de la défier. Elle ne bouge pas, me laissant faire, un sourire effleurant ses lèvres.
__ Fais ce que tu veux avec elle. Mais rien de tout ça ne remplacera ce que tu as avec moi. Ce corps, Alaric... Il t'appartient. Je serai toujours la première.
Ses lèvres s'écrasent contre les miennes, violentes, sans retour possible. La passion dévale comme une avalanche, chaque geste plus impétueux que le précédent. La fièvre, l'adrénaline, tout s'emballe. Elle a toujours ce pouvoir sur moi, ce contrôle. Mais moi aussi, j’ai la force de la retenir.
Je m’arrête soudainement, me détachant d’elle comme un homme frappé par la réalité.
__ Non. Tu ne bougeras pas. Je ne vais pas signer ça. Pas question.
Je suis ferme, autoritaire, mes yeux plongés dans les siens, sans la moindre trace de doute.
__ Ne te fais pas d'illusions. Je pars. C'est ma décision. Mais tu pourras surveiller ce que tu veux, Alaric. Si c'est ça qui te tracasse... Mon corps restera à toi, même quand je serai loin. Aucun autre ne me touchera. C'est toi qui en as la clé.
Ses mots résonnent, lourds, comme une promesse dangereuse.
Je la fixe, ma respiration saccadée, mon cœur battant la chamade. Elle est là, devant moi, aussi déterminée que froide. Je sais que ses paroles ne sont pas juste des menaces vaines. Elle est prête à partir, prête à tout effacer. Et pourtant, quelque chose en moi refuse de l'accepter.
J'ai toujours cru avoir le contrôle, mais face à elle, je suis comme un naufragé, perdu dans un océan de contradictions. Je fais quelques pas en arrière, la tête bourdonnante, avant de m'arrêter, me rendant compte que je ne peux pas simplement la laisser partir ainsi.
__ Serenity, tu ne peux pas me faire ça. Pas après tout ce qu'on a vécu, pas après tout ce qu'on est.
Elle relève le regard, son expression impassible, mais quelque chose dans ses yeux trahit une lueur de doute. Peut-être que ce n'est pas aussi simple pour elle, malgré tout. Mais elle reste calme, ne cédant pas.
__ Je n'ai pas envie de jouer à ce jeu, Alaric. Je veux juste respirer. Et toi, tu veux toujours que je sois celle que tu contrôles, celle qui est à tes pieds. Je n'en peux plus de ça.
Ses mots me frappent comme des coups de poing. Chaque syllabe semble me percer de l'intérieur. Elle a raison, une part de moi a toujours voulu la tenir près de moi, la contrôler, m'assurer qu'elle serait là, à ma merci. Mais à quel prix ?
Je baisse les yeux, réalisant la vérité dans ses paroles. Peut-être que je l'ai étouffée, peut-être que j'ai été trop centré sur ma propre vision de nous. Mais je ne peux pas accepter qu'elle s'en aille. Pas maintenant, pas de cette manière.
__ Et si je te disais que je suis prêt à changer ? Que je peux te donner cet espace dont tu as besoin, sans te perdre dans le processus ?
Elle me scrute un instant, ses lèvres se serrant en une ligne fine, comme si elle mesurait chaque mot que je prononce. Puis elle soupire, se levant lentement, l'air lasse.
__ Alaric, tu ne comprends pas. Ce n'est pas seulement de l'espace que je veux. Ce n'est pas juste une pause. Je veux ressentir la pulsion de la vie en moi, loin de ton monde, loin de toi. Je veux renaître et voir la vie autrement que du sang, des armes et ...
Elle craque et s'arrête.
__ Je sais que mon univers est impitoyable mais tu le savais en t'embarquant avec moi. Qu'est-ce qui a changé ? Tu ne m'aimes plus c'est ça ?
Elle secoue la tête, un sourire amer se dessinant sur ses lèvres.
__ Au contraire, je t'adore et c'est pourquoi je préfère m'éloigner pour essayer de sauver ce qu'il reste de nous. Quand je me sentirais plus forte, je reviendrai mon chéri. Si tu m'aimes, accepte ma décision s'il-te-plaît. C'est juste pour un an.
Un an.
En un an tout peut se passer, ça c'est ce qu'elle semble ignorer. Dans un état second, je récupère les papiers du divorce et les signe.
__ Tu as mon accord, j'espère que tu trouveras la paix dont tu clames tant.
__ Merci Alaric. Ta nouvelle épouse sera là dans les jours à venir, je compte sur toi pour bien te tenir .
Elle achève sa phrase et se dirige vers la porte. Avant de la franchir, elle se retourne et me dit avec tendresse :
__ N'oublie pas que je t'aime !
Je soulève la tête et croise son regard. Elle semble sincère. Je voudrais
continuer d'y croire mais comment le faire quand mon seul ancrage vient de me quitter de manière aussi froide ?
Je pénètre quelques instants après dans sa chambre, le cœur en vrac. L'odeur me frappe en premier celle du désinfectant, des médicaments, de la mort suspendue.Il est là. Étendu. Inerte.Le même décor depuis des mois. Les draps tirés avec une précision clinique. Les machines qui rythment chaque seconde. Les fils qui s'enfoncent dans sa peau comme des chaînes. Mon père. Ou ce qu'il en reste.Depuis son coma, il n'a pas ouvert les yeux une seule fois. Pas une parole. Pas un signe. Juste ce souffle artificiel, ce battement régulier sur les moniteurs.Mais aujourd'hui, tout est différent.Le bip de la machine cardiaque est plus instable. Les chiffres à l'écran dansent, incertains. Et le médecin n'a pas eu besoin d'user de mots pour que je comprenne. La fin est proche.Je m'approche, le regard fixé sur ce visage qui a longtemps imposé le respect, la peur, la loyauté. Jadis, il n'avait pas besoin de parler pour se faire obéir. Un seul regard suffisait.Aujourd'hui, ses yeux sont clos.- Tu
Nos souffles s’apaisent peu à peu. Je reste en elle, encore un instant, à savourer la chaleur de son corps, le frisson qui me parcourt chaque fois que ses doigts effleurent ma peau. Elle ferme les yeux, son visage détendu, presque paisible. Je la regarde, fasciné. Comment une femme peut-elle incarner à la fois la douceur d’un ange et la sauvagerie d’un démon ?Je me retire lentement, l’attirant contre moi, nos corps nus entremêlés sous les draps défaits. Elle repose sa tête sur mon torse, ses cheveux humides collés à ma peau. Mon cœur cogne toujours fort, comme si je venais de frôler l’abîme. Mais ce n’était pas une simple baise. C’était autre chose.— Tu regrettes ? demande-t-elle dans un souffle.— Si je regrettais, je ne serais pas encore là.Elle esquisse un sourire contre mon torse, puis un silence s’installe. Apaisant. Mais pas pour longtemps.Elle relève doucement la tête, plante ses yeux dans les miens. Et ce regard… putain. Il rallume tout. Ce feu incontrôlable, ce besoin vis
Quelques minutes plus tard, alors que je tente de retrouver mon calme dans mon bureau, un toc discret se fait entendre à la porte.- Entre, dis-je sans détourner les yeux de la fenêtre.Angel pénètre dans la pièce, son regard grave. Pas besoin de mots inutiles, je sais qu'il n'est pas là juste pour me saluer.- Boss, je sais que tu voulais tout savoir sur elle, dit-il en s'approchant mais je n'ai rien trouvé de compromettant.Je me retourne lentement, mes yeux accrochés aux siens. Il dépose une tablette sur la table basse et l'allume. Un fichier s'ouvre.__ Elle s'appelle Donna Gold, citoyenne américaine. Dossiers académiques propres, aucun casier judiciaire, pas de famille proche répertoriée. Pas d'amants connus, pas de dettes, pas d'antécédents médicaux, pas même une foutue allergie. On dirait un fantôme.Je le fixe, tendu.- Tout le monde a un passé, Angel. Tout le monde.__ Effectivement Boss, c'est comme si elle a été créée de toute pièce.Impossible.- Elle m'a parlé de cet homm
Elle reste figée dans ma prise, son regard rivé au mien, brûlant d’insolence. Elle ne cille pas. Elle ne recule pas.— Lâche-moi, murmure-t-elle d’un ton bas, presque doux, mais qui n’a rien de tendre. On dirait un ordre déguisé en supplication.Je ne bouge pas. Pas tout de suite. Mon pouce glisse contre l’intérieur de son poignet, là où sa peau est fine, vulnérable. Elle frissonne. L’espace d’une seconde, je crois la tenir, la dominer. Mais ses yeux me ramènent à la réalité : c’est moi qu’elle tient, sans même me toucher.Je relâche sa main. Lentement.— Tu as une sacrée façon de tester les limites, toi.Elle ne répond pas, elle se contente de se lever. Pieds nus sur le sol froid, elle se dirige vers la salle de bains. Sa chemise de nuit épouse ses courbes comme une provocation silencieuse. Je la suis du regard, tendu, prêt à bondir.Mais elle ne ferme pas la porte.— Tu comptes me mater aussi pendant que je pisse ? ironise-t-elle en croisant mon regard dans le miroir.Je souris. Fro
— Et moi, je suppose que j’aime qu’on me laisse tranquille, dis-je d’un ton plus incisif. Dites-le à votre boss.Il n’esquisse pas un mouvement. Pas une seule expression. Il se contente de me regarder, de m’observer comme une ombre, de m’accompagner dans le silence.Je le traverse et retourne dans ma chambre. J'en ai suffisamment vu pour le moment.---En soirée#AlaricAprès ma brève rencontre avec "ma nouvelle femme", je suis allé en mission. Des négociations avec un chef de clan un peu trop ambitieux qui se sont terminées pas comme je l'espérais. Je suis conscient que mon territoire est très convoité, mais jamais je ne laisserai quiconque s'en accaparer. Mon père a lutté pour garder le contrôle et faire fructifier ses affaires. Le minimum, c'est de faire de même ou d’aller au-delà.Dès mon retour, Angel me fait le rapport de nos activités. Je l'écoute discrètement, car je suis éreinté, puis il me passe une information qui éveille ma curiosité soudainement.__ Votre épouse a demandé
Quelques minutes plus tard, une fois mes émotions maîtrisées, j’envoie un message à Zayden pour lui transmettre les instructions. Pour l’instant, je contrôle la situation, il n’a pas à s’en inquiéter. Ensuite, je me débarrasse lentement de mes vêtements, chaque geste mesuré, presque cérémoniel. Peut-être qu’un bain atténuera encore un peu l’incendie qui couve sous ma peau.Je glisse sous la douche. L’eau ruisselle sur mon corps, chaude, enveloppante. Je ferme les yeux, me laisse engloutir par le silence et le martèlement régulier du jet. Mon esprit dérive, s’égare. Le temps s'étire, me perd. Ce n’est que lorsque le froid s’insinue contre ma peau que je coupe l’eau, tire une serviette et l’enroule autour de moi.Je me mets ensuite à ranger mes affaires. Je ne possède que peu de choses. Juste l’essentiel. Inutile d’en faire plus : ces vêtements ne me serviront plus une fois le contrat terminé.Mon cher époux, en revanche, aura tout le loisir de veiller sur moi. Un sourire cruel s’étire