L'Enfer dans ses bras...

L'Enfer dans ses bras...

last updateLast Updated : 2025-05-22
By:  nolwennfcrUpdated just now
Language: French
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Elle pensait avoir touché le fond. Un café minable, une tante droguer, des journées sans fin à survivre dans l'ombre. Mais le pire n'était pas encore venu. Il est apparu, vêtu de rouge et de silence, avec le pouvoir d'un roi et le cœur d'un monstre. Sans choix, sans issue, elle s'est retrouvée prise au piège d'un mariage arrangé, dans une maison où chaque regard est une menace, chaque sourire un mensonge. Il veut un héritier. Elle veut sa liberté. Mais entre la haine, le désir et la douleur, les règles ne tiennent jamais longtemps. Et quand l'amour naît là où il ne devrait jamais exister, tout peut basculer.

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Chapter 1

Introduction

Je suffoque.

L'air est glacial, pourtant je transpire. J'ai la gorge sèche, la bouche pâteuse, comme si j'avais hurlé pendant des heures... ou peut-être que je suis encore en train de hurler. J'en sais rien. Mon cœur cogne contre mes côtes comme s'il voulait s'échapper, me fuir. Moi aussi, j'aimerais fuir.

Mais je suis coincée ici. Prisonnière de ce putain de souvenir.

Tout est noir autour de moi, puis d'un coup, la lumière des phares m'éblouit. Je lève les mains pour me protéger, mais je suis trop lente. Le crissement des pneus déchire le silence de la nuit. Le choc. Le métal qui hurle. Les cris. Les siens. Les miens. Ça va trop vite, et en même temps, chaque seconde dure une éternité.

Je sais ce qui va arriver. Je l'ai revu cent fois. Mille fois. Peut-être plus. Chaque nuit depuis dix ans, ce putain de film repasse dans ma tête comme un mauvais DVD rayé. Je pourrais réciter chaque bruit, chaque sensation. Même l'odeur. Celle du sang chaud. Du cuir brûlé. Du feu. Celle de la mort.

- Maman...!

Ma voix d'enfant résonne dans le vide. Elle n'a que douze ans, cette voix, mais elle porte tout le poids de l'univers. Mes doigts tremblent, crispés sur le siège. J'ai beau essayer, je n'arrive pas à me détacher de cette foutue ceinture. Mes bras sont trop courts, mes gestes trop lents. L'adrénaline me paralyse autant qu'elle me pousse.

Je la vois, elle.

Ma mère.

Sa tête bascule en arrière, ses cheveux collés à son visage ensanglanté. Ses yeux grands ouverts, fixant un plafond qu'elle ne verra plus jamais. Et lui. Mon père. Le visage méconnaissable, coincé entre le volant déformé et le pare-brise explosé. Sa main encore tendue vers moi, comme s'il avait essayé de me protéger jusqu'au bout.

Mais il est trop tard. Ça l'a toujours été.

Je pleure. Dans le rêve, et dans mon lit aussi. Je le sais. Je le sens. Les larmes coulent sans même que je les ressente, comme si mon corps pleurait à ma place, fatigué de porter tout ça. Je veux me réveiller. Bordel, réveille-toi. Réveille-toi !

Un cri me déchire de l'intérieur. Animal. Brut. Je ne sais même pas s'il sort de ma gorge ou de ma tête. Tout se brouille, les lumières, les bruits, les souvenirs, la douleur. Je veux sortir de cette voiture. Je veux courir. Mais mes jambes sont bloquées. Mon cœur aussi.

Et puis, d'un coup, tout s'arrête.

Plus de bruit. Plus de lumière. Juste le silence. Et ce froid, ce froid qui me ronge les os.

Je rouvre les yeux.

Je suis dans mon lit.

Encore trempée de sueur, les draps collés à ma peau comme un piège moite. Mon tee-shirt me colle au dos. Ma respiration est saccadée. Le plafond craquelé au-dessus de moi me rappelle que je suis toujours là, dans cette foutue maison délabrée qui pue l'humidité et les rêves pourris. Une des lattes du sommier a encore cédé cette nuit. Ma colonne vertébrale s'en souviendra toute la journée.

Je m'assois lentement, les jambes tremblantes, le cœur en vrac. J'ai envie de vomir. Comme à chaque fois. Mais j'en ai plus la force. J'ai l'estomac vide depuis hier matin. Peut-être avant-hier. J'ai arrêté de compter. Ça sert à rien de compter dans une vie où y'a plus rien à attendre.

Un bruit étouffé me parvient de la pièce d'à côté. Un grognement. Puis un claquement sec. La porte de la salle de bain ? Un meuble ? J'en sais rien. Je n'ai pas envie de savoir. Pas envie de bouger. Pas envie de voir sa gueule, les yeux injectés, le mascara qui dégouline, la bave blanche au coin des lèvres, et ce sourire vide. Ma tante.

C'est comme ça tous les matins. Enfin, ceux où elle est encore en vie quand je me réveille.

Je passe mes mains sur mon visage, chasse la sueur, mais je sens encore le sang. Celui du rêve. Celui de mes parents. Il est là, dans ma mémoire, incrusté sous mes ongles, collé à ma peau, à mon âme. J'ai beau frotter, rien n'y fait. Il reste. Il reste toujours.

Je pose les pieds sur le sol. Froid. Rugueux. Le lino déchiré laisse apparaître le béton par endroits. Une fissure traverse la pièce comme une cicatrice mal refermée, un peu comme moi. Je passe mes doigts dessus à chaque fois, machinalement, comme si elle allait me raconter un secret. Mais y'a rien. Juste du vide.

Ma chambre, si on peut appeler ça une chambre, est minuscule. Un matelas pourri posé sur un sommier bancal, une vieille commode bancale avec deux tiroirs qui ferment plus, une chaise défoncée et un miroir fêlé accroché de travers au mur. C'est tout ce que je possède. Le reste, je le garde en moi. Là où personne ne peut fouiller.

Je me traîne jusqu'à la fenêtre. Pas pour admirer le paysage — y'a rien à admirer ici — juste pour fumer une cigarette volée dans le sac de ma tante. Une habitude que j'ai prise à 14 ans, quand j'ai compris que rien dans ce monde ne viendrait me sauver.

Le rideau en lambeaux me colle aux bras quand j'ouvre. L'air du dehors est lourd. Il sent le chien mouillé et la pisse. Bienvenue chez moi. Quartier mort, ville morte. Les gens ici ne vivent pas, ils survivent. Comme moi. Comme elle. Enfin, quand elle est pas trop défoncée pour bouger.

Je l'entends vomir dans le lavabo. Puis gémir. Puis pleurer. Ça recommence.

- Catalina...!

La voix de Carmen, ma tante, me glace. C'est pas qu'elle m'appelle, c'est comment elle m'appelle. Le ton. Un mélange de supplication, de colère et de dépendance. Comme si j'étais responsable de sa merde. Comme si j'étais la mère et elle l'enfant.

Je souffle un nuage de fumée par la fenêtre et je reste là, immobile. Le mégot entre les doigts, le regard perdu sur les maisons en ruine d'en face. Je pourrais rester comme ça des heures. Oublier. Me figer. Mais je sais qu'elle va débarquer si je viens pas.

Alors je me tourne. Je fais ce que je fais tous les jours depuis que j'ai douze ans : j'enfile mon masque. Pas de maquillage. Juste ce regard vide que j'ai appris à maîtriser, cette indifférence feinte qui me protège. J'ouvre la porte.

L'odeur me frappe comme un coup de poing. Mélange de pisse, de moisissure, d'alcool bon marché et de poudre. Je retiens mon souffle. Elle est là, à moitié affalée sur le canapé, les cheveux en bataille, un tee-shirt d'homme trop grand qui lui colle à la peau. Elle est pieds nus. Ses jambes maigres sont pleines d'hématomes. Elle a encore dû tomber hier.

Ses yeux me fixent, embués, dilatés. Elle tend la main.

- T'as pas un peu d'thune...? Juste pour tenir jusqu'à ce soir... je te jure, après j'arrête.

Je réponds pas. Elle le sait très bien que j'ai rien. Et même si j'en avais, je lui donnerais pas. J'ai plus envie de l'aider. Plus envie d'être cette gamine naïve qui croyait qu'un peu d'amour suffisait à réparer les gens cassés.

Je me contente d'attraper mon sac dans l'entrée. Un vieux truc élimé, rafistolé avec des agrafes. Je m'apprête à sortir, mais sa voix me rattrape. Plus rauque. Plus dure.

- Hé... j'ai dit t'as pas un peu d'fric, putain ?!

Je me fige. Mon dos se tend. Je serre les poings. J'ai appris à ne pas répondre. Répondre, c'est recevoir une gifle, ou pire. Mais aujourd'hui, je suis fatiguée. Épuisée même.

Je me retourne lentement. Mes yeux plongent dans les siens.

- Non. Et j'en aurai pas demain non plus. Bouge ton cul et trouve-toi un boulot.

Elle rit. Un rire cassé, sans joie.

- T'es une petite ingrate... Tu crois que je t'ai élevée pourquoi, hein ? Par charité ? Tu devrais me remercier, bordel !

Je me retiens de hurler. Elle ne m'a pas élevée. Elle m'a ramassée. Comme on ramasse un chien blessé sur le bord de la route, sauf qu'on oublie de le nourrir, qu'on le bat quand il aboie trop fort, et qu'on lui crache dessus quand il tente de s'enfuir.

Mais je dis rien. Je claque juste la porte.

Je descends les escaliers deux par deux. La rampe est branlante, les murs tagués. On vit dans un immeuble où personne ne dit bonjour, où les voisins détournent les yeux, où les cris sont couverts par le bruit des télévisions. Ici, tout le monde sait. Mais personne ne dit rien. Parce qu'on vit tous un enfer différent.

Dehors, il fait encore nuit. Le soleil tarde à se lever. Il sait sûrement qu'il est inutile ici. Je traverse la rue en vitesse, sans même regarder. J'ai pas peur de mourir. J'ai peur de survivre encore.

Je m'assois sur un banc rouillé, juste en face du parking désert. C'est là que je viens quand j'en peux plus. Il est moche ce banc, mais il est à moi. Personne ne vient me faire chier ici. Et surtout, c'est là que mes souvenirs se taisent un peu.

Je ferme les yeux. Je revois la voiture. Le choc. Le sang. Les cris. Les flammes.

Et cette putain de sirène des pompiers.

Toujours elle.

Toujours au moment où je pense l'oublier.

Je sais pas combien de temps je reste là. Peut-être une heure. Peut-être trois. Le froid m'a engourdi les doigts, mais je m'en fous. J'ai même pas envie de bouger. Parce que rentrer, c'est recommencer. C'est se confronter à elle, à l'odeur de poudre et de regret, au plafond moisi, au lit qui grince, à la vie qui pue la fin.

Alors je reste.

Le banc est dur, inconfortable, mais c'est toujours mieux que ce qu'il y a derrière cette porte.

Je m'allume une autre clope, les yeux rivés sur le ciel noir. Il est vide. Pas d'étoiles. Pas même une lune pour faire semblant de veiller sur moi. Y'a juste ce néant au-dessus de ma tête. Et moi, minuscule, perdue dans le creux d'un monde qui m'a recrachée trop tôt, trop violemment.

J'essaie de penser à autre chose. Mais mes pensées me ramènent toujours au même point.

Le sang.

Le feu.

Le cri.

Et l'absence.

Y'a des jours où j'me dis que j'aurais dû mourir avec eux. Que ça aurait été plus simple. Plus juste. J'étais là. J'étais dans cette foutue voiture. Pourquoi j'ai survécu ? Pourquoi moi ? Pourquoi pour ça ?

Pour me faire trimballer de foyer en foyer comme un sac trop lourd ? Pour me faire traiter comme une erreur qu'on peut revendre, frapper, ignorer ? Pour finir ici, à supplier des inconnus pour un job de merde, un peu de respect ou un sandwich ?

Je tire sur ma cigarette jusqu'à ce que le bout me brûle les doigts. Même ça, j'ai pas la force de le jeter. Je laisse juste la douleur me rappeler que je suis encore en vie. Que je suis toujours là. Malgré tout.

Les premières lueurs de l'aube pointent à peine, mais je les ressens dans ma peau, dans mes os. Cette lumière fade qui s'étale sur les murs sales, qui dévoile la misère qu'on préfère ignorer la nuit. Le jour, ici, c'est pas une promesse. C'est une punition.

Un chat famélique traverse la rue en boitant. Il me regarde. Moi aussi je le regarde. On est pareils, lui et moi. Mêmes cernes, même solitude, même instinct de survie. Je pourrais presque lui parler. Mais j'ai plus la force de sortir un mot.

Je me recroqueville sur moi-même. Les bras croisés sur la poitrine, les genoux remontés contre mon ventre. Comme si je voulais redevenir petite. Me replier dans un endroit où le monde peut plus me toucher. Mais y'a plus de refuge. Juste moi. Et ce vide.

J'ai pas sommeil. Le cauchemar m'a lessivée, mais le sommeil viendra pas. Il vient plus depuis longtemps. Pas comme avant. Pas en paix.

Alors je ferme les yeux, sans chercher à m'endormir.

Et j'attends que le jour me brûle.

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