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Chapitre 4

Author: nolwennfcr
last update Last Updated: 2025-05-19 15:34:40

Alejandro

7h00. Pile.

Je ne tolère pas le retard. Le pouvoir appartient à ceux qui se présentent avant l’heure et parlent après que tout le monde s’est tué. Moi, je suis là depuis six minutes. Dans cette maison qui pue la mort lente, la crasse et la désillusion.

Tout est humide ici. Les murs suintent quelque chose que je ne saurais nommer. C’est plus que la moisissure. C’est la pauvreté qui s’incruste. La honte, peut-être. Ou la résignation. C’est un lieu sans futur. Ça me répugne. Mais aujourd’hui, j’en ai besoin.

Je suis assis sur une chaise bancale, face à une table collante. Mes deux hommes gardent le silence derrière moi. Ils savent qu’ici, ce n’est pas la force qu’on vient imposer. Pas tout de suite. C’est la loi du plus grand. Celle qui s’écrit dans les regards, pas dans les coups.

Et moi, je suis le plus grand.

Elle tarde à descendre. Catalina.

Mais je ne m’impatiente pas. Elle viendra. Elles viennent toujours.

Une minute encore. Puis j’entends des pas. Lents. Légers. Presque hésitants. Je me lève. Je redresse mes épaules. Et je la vois.

Elle descend l’escalier, cheveux encore humides, lâchés sur ses épaules. Ils brillent, noirs et lisses, comme une coulée d’encre fraîche. Elle est fine, mais pas maigre. Des hanches dessinées, une taille marquée, de longues jambes qui glissent sous un pantalon trop grand pour elle.

Elle ne s’habille pas pour séduire. Elle s’habille pour survivre. Et pourtant, elle est belle.

Innocente sans le savoir. Sauvage sans le vouloir.

Elle est exactement ce dont j’ai besoin.

Ses yeux croisent les miens. Marron clair. Pas banals. Vivants, malgré la fatigue.

Elle me regarde sans baisser les yeux. Elle a peur, mais elle la camoufle. C’est bien. Je préfère une femme qui se défend un peu.

Elle s’arrête en bas de l’escalier.

Je la regarde. Longuement. Calmement.

C’est elle.

Le pion. L’épouse. La preuve que je suis prêt. Prêt à prendre ce qui m’est dû.

Je ne suis pas ici pour tomber amoureux. Je ne suis pas ici pour caresser une peau douce ou m’extasier devant des courbes. Je suis ici pour devenir chef.

Et pour ça, j’ai besoin d’une vierge.

Catalina est parfaite pour ce rôle. Elle n’a personne. Elle n’est rien.

Donc elle deviendra ce que je décide.

Sa tante arrive enfin. Les cheveux gras, les mains qui tremblent. Une loque. Une coquille vide avec des dettes pleines. Si ce monde était juste, elle serait déjà morte depuis longtemps.

- On avait dit sept heures, je dis, sans me retourner.

- J’ai pas d’horloge.

Sa voix est rauque. J’ai envie de lui enfoncer un couteau dans la gorge juste pour faire taire ce son. Mais je garde mon calme.

Je dépose une mallette sur la table. J’en sors un dossier. Lentement. Tout est prévu.

- Le contrat est simple, je murmure. Vous signez, et elle vient avec moi pendant 2ans. La dette est effacée. Complètement.

La tante cligne des yeux, hésite.

- Et elle ? Si elle veut pas ?

Je souris. Froidement.

- Vous n’avais pas le choix. Ni vous. Ni elle. Sinon je vous tirerais une balle en plein milieu de votre front à chacune de vous.

Elle tremble. Mais elle attrape le stylo.

Et elle signe.

Je regarde Catalina.

Elle est figée. Elle n’a pas bougé. Mais ses poings sont serrés. Sa mâchoire aussi. Ses yeux brillent. Elle ne comprend pas encore que tout est terminé. Que son ancienne vie s’est achevée à l’instant où l’encre a touché le papier.

Je me tourne vers elle.

- Prends un manteau. Tu viens avec moi.

Elle me fixe. D’abord surprise. Puis dégoûtée. Ensuite brisée.

- Non. S’il vous plait…

Un mot. Un souffle. Un échec déjà.

Je m’approche. Lentement. Jusqu’à pouvoir entendre sa respiration. Jusqu’à pouvoir sentir l’odeur de son shampooing bon marché.

- Tu vas venir avec moi que tu le veuille ou non. Tu sais pourquoi ? Parce que je peux faire de ta vie un enfer bien plus sombre que celui que tu quittes.

Elle recule. Mais pas assez.

- Je peux faire en sorte que personne ne te retrouve jamais. Ou pire… que tout le monde te retrouve, dans l’état où je t’aurai laissée. C’est à dire mort.

Ses lèvres tremblent. Elle ravale ses larmes.

Mais elle comprend.

Elle hoche la tête. Tourne les talons. Disparaît à l’étage. Je ne bouge pas.

Quelques minutes plus tard, elle redescend avec un manteau gris sur les épaules. Elle n’a rien d’autre. Même pas un sac. Même pas un souvenir.

Je n’ai rien à lui dire. Elle sait.

Je tends la main vers la porte. Elle passe devant moi sans me regarder.

Et moi… je la suis.

Parce qu’à partir de ce jour, elle est à moi et fera tous se que je veux.

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