Se connecterNoël approche dans une petite ville enneigée. Élise, photographe solitaire, revient dans la maison familiale pour la première fois depuis la mort de sa mère. Elle n’est pas seule : à ses côtés, Noé, son fils de six ans, curieux et rêveur, dont les yeux semblent souvent chercher quelque chose ou quelqu’un. Tout lui semble figé : les guirlandes, la neige, les rires des autres. Rien ne la réchauffe vraiment. Un soir, au marché de Noël, elle croise Jonas, l’homme qu’elle a aimé autrefois. Celui qu’elle a fui sans un mot. Celui qu’elle a aimé assez fort pour le perdre. Le choc est silencieux, mais profond : un regard suffit. Jonas remarque la ressemblance entre Noé et lui, et un soupçon interdit germe dans son esprit. Le sourire, le regard, certains gestes , tout semble trop familier. Les jours suivants, la neige isole la ville. Jonas vient les voir sous prétexte d’aider, puis reste plus longtemps, trop longtemps. Entre eux, la tension renaît, la pudeur se fissure. Dans la maison glacée, au milieu des jouets et des souvenirs, la passion resurgit, brute et irrésistible , mêlant la tendresse d’hier à la douleur d’aujourd’hui. Chaque baiser, chaque étreinte est un mélange de désir et de culpabilité, car Jonas ne peut ignorer la possibilité que Noé soit son fils. Mais Jonas n’est pas revenu libre : il vit ailleurs, il va se marier. Élise sait qu’elle ne peut ni le retenir, ni lui révéler la vérité. Le silence devient leur complice, tandis que la neige tombe dehors et que Noé dort, ignorant tout. Au matin, Jonas s’en va. Noé se réveille et demande : — Il reviendra, le monsieur aux yeux tristes ? Élise sourit doucement, les yeux pleins d’eau. — Peut-être… quand la neige reviendra.
Voir plusÉlise
La maison sent la cire et le vide. Je pousse la porte, une bouffée d’air froid entre avec nous, dérangeant la poussière qui danse dans la lumière d’hiver. Noé se serre contre ma jambe, son petit sac à dos sur les épaules, les yeux grands ouverts. Il observe tout : le vestibule sombre, l’escalier qui monte vers l’inconnu, le manteau de ma mère encore accroché à la patère.
— C’est grand, murmure-t-il.
Sa voix résonne, fragile. Je pose une main sur sa tête, mes doigts s’attardant dans ses cheveux si fins, si blonds. Comme les siens. Toujours cette pensée, lancinante. Elle revient à chaque battement de cœur, à chaque fois que je regarde mon fils.
Je dépose les valises sur le carrelage froid. Le silence ici est différent de celui de la ville. Il est épais, chargé, comme si les murs retenaient leur souffle. Ma mère est partie depuis six mois, et personne n’a dérangé l’ordre qu’elle aimait tant. Les napperons sont bien droits sous les vases, le calendrier des postes est encore ouvert à juillet. Un été figé. Je ferme les yeux, je respire. L’odeur du nettoyant, son parfum à elle, le lilas. Une boule se forme dans ma gorge.
Noé s’éloigne de moi, attiré par le salon. Je le suis. La pièce est plongée dans une pénombre bleutée par la neige qui tombe derrière la baie vitrée. Des meubles lourds, des souvenirs sous verre. Et, sur le manteau de la cheminée, les photos. Des rangées de cadres dorés. Ma communion. Mon diplôme. Et lui. Jonas. La photo est petite, prise en secret peut-être, il rit, les yeux plissés, une mèche sombre sur le front. Je l’avais oubliée ici. Ou peut-être que ma mère l’avait sortie après mon départ, une manière silencieuse de me questionner.
Je saisis le cadre, le retourne brutalement. Le bois heurte le marbre. Le bruit est sec, violent. Noé sursaute, se retourne.
— Qu’est-ce que c’était ?
— Rien, mon cœur. Une photo qui est tombée.
Il me regarde, un peu méfiant. Ses yeux, d’un gris-vert changeant, scrutent mon visage. Parfois, avec ce regard, j’ai l’impression qu’il voit au-delà des mots. Qu’il sait, sans savoir. Je détourne les yeux, honteuse soudain.
— Allons faire du feu, veux-tu ? Il fait un froid de loup.
Le marché de Noël est une bulle de lumière et de bruit dans la nuit glaciale. Des stands de bois, des odeurs de vin chaud, de cannelle et de sapin. Noé est hypnotisé par les lumignons, par la grande roue qui tourne lentement dans le ciel noir, éparpillant des éclats de couleurs sur la neige fraîche. Je lui tiens la main très fort. La foule me submerge. Trop de rires, trop de gens pressés les uns contre les autres dans leur quête de joie.
Je l’emmène vers le stand de figurines en bois. Il choisit un renne, le tourne et le retourne dans ses mains avec une gravité touchante. C’est alors que je lève les yeux pour vérifier l’heure au clocher de l’église.
Et le temps s’arrête.
À quelques mètres, près du stand de vin chaud, un homme se retourne. Un profil que je connais par cœur. La ligne de la mâchoire, la nuque sous la laine du bonnet. Il porte une parka sombre, les mains enfoncées dans les poches. Il rit à quelque chose que dit son compagnon.
Jonas.
Le souffle me quitte. Le bruit ambiant s’éteint, remplacé par un bourdonnement sourd dans mes oreilles. Mon cœur cogne si fort que j’ai peur qu’il l’entende. Je devrais partir. Tourner les talons, entraîner Noé, disparaître dans la foule. Mais je suis clouée sur place, une statue de glace.
Comme si je l’avais appelé, il tourne la tête. Son regard balaie la foule, passe sur moi, puis revient. S’accroche. Les pupilles se dilatent. La surprise, puis l’incrédulité, puis quelque chose de plus profond, de plus ancien, qui traverse les années d’un seul coup. Un éclair de douleur, de colère, de… reconnaissance.
Il ne sourit pas. Il ne bouge pas. Il me regarde. Et je le regarde. Le monde se réduit à cet espace de quelques mètres, à ce fil tendu à se rompre qui nous relie encore.
ÉliseNous restons ainsi, je ne sais combien de temps, chacun dans notre bulle de nuit glaciale, séparés par quelques centaines de mètres de neige et sept ans de mensonges. Deux points fixes dans l’obscurité, reliés par un fil invisible qui brûle.La lueur rouge s’éteint finalement. La silhouette bouge, s’éloigne, se fond dans l’ombre.Je reste. Je guette l’aube.---Le lendemain est un jour de plomb. Le ciel est bas, gris, promettant encore de la neige. Noé est surexcité par l’épaisseur du manteau blanc et réclame une bataille de boules de neige. Je m’exécute, riant de ses rires, feignant l’enthousiasme. Chaque geste est un effort. Je suis un pantin dont les fils sont tenus par l’attente.Va-t-il revenir ?Ai-je envie qu’il revienne ?La réponse, viscérale, immédiate, me fait honte. Oui. Même après le baiser. Même après la menace. Surtout après.Nous rentrons pour le déjeuner, les joues rougies, les doigts gourds. Au moment où je pose le plat de pâtes sur la table, on frappe à la por
ÉliseLa porte se referme. Le déclic du pêne est un coup de feu dans le silence de la maison.Je reste là, dans la cuisine, les mains agrippées au rebord de l’évier comme à une bouée. Le froid du granit traverse mes paumes. Mes lèvres sont brûlantes, tuméfiées. Je peux encore sentir le poids de ses mains sur mon visage, la pression impérieuse, désespérée, de sa bouche. La violence du besoin. Le goût de lui, mêlé à celui de ma propre trahison.J’ai failli.J’ai failli à la promesse que je m’étais faite le jour où j’ai vu le deuxième trait bleu sur le test. La promesse de les protéger tous les deux : lui, de la vérité ; moi, de son rejet.L’eau coule toujours à l’étage. Le bain. La normalité. Noé chante une chanson absurde, sa voix claire et fausse traverse le plafond. Cette petite mélodie innocente me transperce comme une lame. Je me redresse d’un coup, le cœur battant à tout rompre. Je monte l’escalier, les jambes flageolantes.La salle de bain est remplie de vapeur. Noé est dans l’ea
JonasJe m’arrête derrière elle. Je ne la touche pas. Mais je sens la chaleur de son corps. Je respire son odeur – le même shampooing, un parfum de peau changé, mûri. Un vertige me prend. Les années s’effacent. Nous sommes dans la cuisine de son ancien appartement, un matin d’été, et elle rit, le soleil dans les cheveux…— Élise.Elle ne répond pas. Son reflet dans la vitre est flou, un fantôme dans la nuit.— Il a quel âge, Noé ?Elle se fige. Ses épaules se soulèvent, retombent.— Six ans.Six ans. Le calcul est immédiat, brûlant. Sept ans depuis qu’elle est partie. Six ans depuis sa naissance. La fenêtre est trop étroite. La possibilité est là, énorme, monstrueuse, splendide.— Élise… regarde-moi.— Non.Je pose une main sur son épaule. Elle sursaute comme si je l’avais brûlée, mais elle ne se dégage pas. Sous la laine du sweat, je sens l’os, la tension de chaque muscle.— Est-ce qu’il est… ?Elle se retourne d’un coup, les yeux brûlants, pleins d’une terreur et d’une colère qui me
JonasLa chaleur du feu me brûle le visage, mais l’intérieur de ma poitrine est un bloc de glace. Je suis assis sur le tapis usé, trop grand, trop raide, dans cette maison qui sent le lilas et le bois sec. Le gamin : Noé , est blotti contre mon côté, pas par affection, mais par curiosité pure. Il me montre un caillou qu’il a trouvé dans le jardin, « un caillou de lave, monsieur, regarde ses trous ». Sa voix est un petit flux continu, assuré, rêveur.Je murmure une approbation, mais mes yeux ne quittent pas Élise.Elle est debout dans l’encadrement de la porte, immobile comme une biche surprise sur une route. Ses bras sont croisés, une main serrant le coude opposé si fort que les jointures sont blanches. Elle ne me regarde pas, elle fixe un point derrière moi, sur le mur. Son profil est toujours aussi net, aussi pur, mais creusé par les années. Une fine cicatrice, nouvelle, barre son sourcil droit. J’ai une envie violente, soudaine, de poser mon doigt dessus, de lui demander comment. D






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