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Chapitre IV : Le dîner

Author: Audrey sih
last update Last Updated: 2025-06-12 00:51:15

(Bureau de Kenneth – 18h45)

"—Eniko sera là ce soir. Oui, avec la robe bleue que tu as choisie."

Mon père, debout près de la fenêtre, se retourna avec ce sourire de vieux requin qui me donnait envie de balancer mon whisky contre le mur.

- "Enfin ! Enfin tu te comportes en vrai Mayala !"

J’ai levé une main, les doigts serrés.

-"Ta gueule, papa. J’ai pas la tête pour ton enthousiasme à deux balles."

Il a eu l’air choqué – comme si à 26 ans, j’allais encore trembler devant ses sermons. Je me suis servi un deuxième verre, la glace claquant contre le cristal.

"Elle vient parce que je l’y oblige. Pas pour tes conneries de ‘grande famille unie’."

Mon téléphone a vibré. **Félix.**

"Oui ?"

La voix de mon oncle était trop douce, comme toujours quand il mijotait un coup fourré.

"Ton père m’a dit pour la petite. Elle sera là à 20h ?"

J’ai regardé l’heure. Deux heures pour transformer une étudiante fauchée en princesse de pacotille.

"Elle sera présentable. Occupe-toi des fleurs et ferme ta gueule sur l’affaire du juge."

J’ai raccroché avant qu’il ne réponde.

Eniko était assise raide comme un piquet devant le miroir, une styliste en train de lui lisser les cheveux. Elle m’a vu entrer dans le reflet et a roulé des yeux.

"Content ? J’ai l’air d’une poupée de salon."

La robe bleu nuit moulait sa silhouette – pas mal pour une commande express. Mais c’était ses yeux qui m’intéressaient : noirs de rage, brillants comme des lames.

Je me suis penché, voix assez basse pour que seule elle entende :

"Écoute-moi bien. Ce soir, tu souris, tu m’appelles ‘mon amour’, et surtout…" J’ai attrapé son poignet. "...tu touches pas à ton téléphone. Félix a payé trois serveurs pour fouiller ton sac."

Elle a dégagé sa main d’un geste brusque.

"Je sais jouer la comédie, Mayala. Mais rappelle-toi : c’est TOI qui danse pour MOI ce soir."

La coiffeuse a toussé, gênée.

J’ai souri. Putain, cette fille avait du cran.

(Voiture de Kenneth - 19h45)

La Rolls-Royce Phantom glissait silencieusement sur la route éclairée, l'intérieur capitonné de cuir blanc. Kenneth jetait des regards discrets à Eniko, assise raide à ses côtés. Elle fixait la vitre teintée, ses ongles parfaitement manucurés enfoncés dans ses genoux. Pas un mot depuis qu'ils avaient quitté l'endroit.

"Tu pourrais au moins faire répétition," grogna-t-il en ajustant son nœud papillon.

Elle tourna lentement la tête vers lui, un sourire faux aux lèvres :

"Ne t'inquiète pas, Mayala. Je connais mon rôle."

Les portails dorés s'ouvrirent sur une allée bordée de torches. Eniko prit une profonde inspiration... et changea instantanément.

Dès que le chauffeur ouvrit la portière, elle posa une main légère sur l'avant-bras de Kenneth, ses traits s'illuminant d'un sourire éblouissant.

"Mon amour, ta maison est magnifique !" s'exclama-t-elle, assez fort pour que les domestiques l'entendent.

Kenneth faillit s'étouffer avec sa salive. *Putain, elle est bonne.*

Il se ressaisit aussitôt, enveloppant sa taille d'un bras possessif :

"Attends de voir l'intérieur, chérie."

Félix les attendait au pied de l'escalier en marbre, un whisky à la main. Son regard glissa sur leur étreinte avec un sourire en coin.

"Eniko ! Enfin !" Il tendit les mains en grand seigneur. "Comme tu es radieuse ce soir."

Elle se blottit contre Kenneth, jouant parfaitement la jeune fiancée timide :

"Merci, oncle Félix. Kenneth m'a tant parlé de vous..."

Kenneth sentit un frisson lui parcourir l'échine. Elle était terrifiante.

***

Entre deux bouchées de homard, Eniko effleurait la main de Kenneth, riant aux blagues de son père avec un naturel déconcertant.

"Notre mariage sera en décembre," annonça-t-elle soudain, les yeux brillants. "Comme ça, bébé pourra naître pendant les fêtes !"

La fourchette de Félix heurta son assiette avec un tintement cristallin.

Kenneth lui serra la cuisse sous la table - avertissement ou félicitations, il ne savait plus.

***

La lumière des lustres en cristal se reflétait dans les coupes en champagne vides. Eniko, toujours accrochée au bras de Kenneth, venait de raconter pour la troisième fois leur "rencontre romantique" - une version tellement édulcorée que Kenneth avait failli s'étouffer avec son vin.

"Et quand il m'a offert des fleurs devant toute la faculté de médecine..." Elle rougit exagérément en jouant avec ses boucles d'oreilles en diamant.

La tante Agathe soupira, attendrie :

"Comme c'est mignon ! Enfin quelqu'un qui adoucit notre Kenneth !"

Kenneth, les dents serrées, glissa une main dans le dos d'Eniko et pinça légèrement sa taille. Trop loin, princesse.

Elle répondit en lui enfonçant son talon aiguille dans le pied.

(Balcon - 21h30)

Eniko s'échappa sous prétexte de prendre l'air. Kenneth la rejoignit deux minutes plus tard, feignant de lui offrir son vestiaire.

"Tu exagères," gronda-t-il entre ses dents souriantes. "Depuis quand est-ce que j'offre des fleurs ?"

Elle tourna vers lui un regard de velours, pour les éventuels témoins, mais sa voix était un couteau :

"Tu veux que je sois crédible ? Alors ferme-la et joue le jeu, mon amour."

Elle lui caressa la joue avec une feinte tendresse avant d'ajouter :

"D'ailleurs, ton oncle nous observe depuis la porte-fenêtre. Embrasse-moi."

Kenneth sentit son cœur faire un bond. Elle bluffait ?

(Hall d'entrée - 22h15)

Félix frappa son verre avec une cuillère en argent.

"Chers invités, une surprise pour nos tourtereaux !"

Un projecteur s'alluma sur le pianiste. Et soudain...

Kévi entra, poussé par deux gardes.

Eniko sentit les doigts de Kenneth se crisper sur son poignet.

"Bonne surprise, n'est-ce pas ?" chuchota Félix à son oreille. "Une réunion de famille complète !"

Un silence de plomb tomba sur l’assemblée. Eniko sentit le sourire figé sur ses lèvres, sa main dans celle de Kenneth devenant soudain une griffe.

"Kévi…" murmura-t-elle, juste assez fort pour que son frère l’entende.

Le jeune homme, vêtu d’un costume trop large qui n’était clairement pas le sien, avait les yeux écarquillés. Il chercha désespérément son regard, mais Félix s’avança déjà, une main possessive sur son épaule.

"Nous avons pensé que notre futur beau-frère devait être présent !" déclara-t-il, sourire carnassier.

"Après tout, la famille, c’est sacré… n’est-ce pas, Kenneth ?"

Kenneth sentit la tension monter. Il serra légèrement la main d’Eniko, un avertissement silencieux.

"Bien sûr," répondit-il, voix lisse. "Quelle… attention délicate, oncle."

(Pendant le dîner - 22h30)

Eniko, assise entre Kenneth et Kévi, jouait parfaitement son rôle de fiancée épanouie, tout en glissant discrètement un morceau de pain dans la poche de son frère sous la table.

"Alors, Kévi," lança Félix en découpant son filet mignon, "tu dois être ravi de cette union ?"

Kévi, maladroit, faillit renverser son verre d’eau.

"Euh… oui. Très."

Eniko lui pressa le genou sous la table.

Kenneth, observant la scène, se pencha vers elle et murmura, lèvres contre sa tempe :

"Il est horrible acteur. Heureusement que toi, tu es douée."

Elle lui adressa un sourire sucré, tout en lui écrasant le pied sous la table.

(Salon des invités - 23h00)

La soirée se poursuivit dans un semblant de normalité. Eniko, adossée au piano, feignait d’écouter la tante Agathe lui raconter pour la troisième fois son voyage à Paris.

Kévi, toujours sous surveillance discrète, tentait de ne pas croiser le regard de Félix.

Kenneth, un whisky à la main, observait tout cela avec une lassitude feinte… jusqu’à ce que son oncle l’attire dans un coin.

"Alors, mon neveu," murmura Félix, "tu ne trouves pas étrange que ton futur beau-frère ait passé les trois derniers mois à fouiner dans nos affaires ?"

Kenneth but une gorgée, impassible.

"Je trouve surtout étrange que tu t’en sois aperçu seulement maintenant."

Félix sourit, mais ses yeux restèrent froids.

"Rassure-toi… tout sera réglé bientôt."

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