Marko
Je le vois , ce petit , toujours lui .
Une silhouette fragile au milieu d’un monde brutal. Une présence inattendue qui trouble l’ordre immuable de ma vie . Quand il passe près de moi, c’est comme si l’air se chargeait d’électricité, et cette étincelle me brûle de l’intérieur.
Je suis Marko , le chef des chefs. Celui devant qui on s’incline sans un mot, celui dont le regard suffit à briser des montagnes, à faire trembler des empires. Je suis le maître des ombres, le roi des ruines. Je n’ai jamais laissé quoi que ce soit m’atteindre . Jamais !
Et pourtant, ce petit me trouble.
Je devrais le haïr , le mépriser , le considérer comme un insecte insignifiant, un grain de poussière que l’on balaye sans pitié.
Mais non.
Il s’est installé dans mon esprit comme un poison lent, une mélodie obsédante qui refuse de s’éteindre.
Je me surprends à repenser à sa voix, douce et tremblante, à ses gestes maladroits, à la façon dont il détourne les yeux, cherchant à cacher ce feu étrange qui brûle derrière ses pupilles.
Je sens mon cœur se serrer quand je me rappelle ce regard, à la fois défiant et vulnérable. Un mélange explosif qui me désarme.
Je ne suis pas ce genre d’homme. Je ne connais pas cette faiblesse.
Je ne suis pas gay , jamais !
Le pouvoir, la domination, les femmes voilà ce qui a toujours rythmé ma vie. Ce sont mes armes, mes refuges, mes certitudes.
Alors pourquoi, pourquoi est-ce que ce simple gamin, ce petit être fragile, fait trembler mes murailles intérieures ?
Chaque fois qu’il est là, chaque fois que son ombre croise la mienne, je sens mon corps tout entier se tendre comme un arc prêt à rompre. C’est une alerte, une confusion, une tentation à laquelle je refuse de céder.
Je déteste cette faiblesse qui s’installe sournoisement. Je déteste ce sentiment qui me fait vaciller.
Je m’enferme dans mon bureau, dans cette forteresse de verre et d’acier où le silence est roi.
Je serre les poings, les phalanges blanchies par l’effort.
Je me bats contre ce chaos intérieur.
Mais cette lutte me consume.
Leurs voix, leurs regards, les murmures dans les couloirs tout cela devient un vacarme infernal quand il est près de moi.
Je ne peux pas me permettre d’aimer, pas dans mon monde.
Je ne peux pas perdre le contrôle, pas devant lui.
Et pourtant, je ne peux plus le fuir.
Il est là. Toujours là.
Et je sais, au fond de moi, que je ne pourrai jamais l’oublier.
Je ferme les yeux, je respire profondément.
Mais quand je les rouvre, c’est encore lui, toujours lui, ce petit qui fait vaciller l’ombre.
Je ne peux pas rester là, à me débattre dans ce feu intérieur qui me consume. Cette faiblesse, ce doute, cette putain d’obsession qui me ronge.
Je dois oublier. Je dois m’éteindre.
Je serre le poing, furieux contre moi-même, contre ce foutu gamin qui s’est immiscé dans mon esprit.
Alors je fais ce que je sais faire quand tout devient trop lourd.
Je décroche mon téléphone. Mes doigts tremblent à peine.
— Envoie-moi quelqu’un. Une fille. La meilleure. Celle qui sait comment me faire du bien .
Pas de place pour la tendresse, pas de place pour les sentiments. Juste un besoin viscéral d’oublier.
Je sens déjà la chaleur me monter aux tempes, le rythme de mon cœur qui s’emballe.
Je veux cette nuit de néant. De corps froids et de baisers sans âme. De gestes mécaniques qui brûlent sans laisser de trace.
Je ne veux pas penser. Je ne veux pas sentir.
Quand elle arrivera, je la réduirai à une simple machine, une distraction passagère, un outil pour éteindre le feu.
Mais au fond, je sais.
Je sais que rien ne peut noyer ce qui me déchire.
Je sais que ce petit est là, dans chaque battement, dans chaque souffle.
Alors je me prépare.
Je me nettoie, je m’habille.
Je me fais violence.
Je ferme la porte de mon bureau.
Et j’attends.
La porte s’ouvre sur un soupir, un frôlement presque imperceptible, mais qui résonne comme une invitation dans la pénombre de mon bureau. Elle glisse à l’intérieur, silhouette longiligne, robe noire satinée épousant ses formes avec une précision calculée. Ses talons claquent doucement sur le parquet, cadence lancinante qui emplit l’espace d’une tension palpable.
Un parfum âcre, doux, entêtant, s’insinue aussitôt dans mes narines, s’accroche à ma peau, comme une caresse invisible, une promesse silencieuse. Je la détaille du regard, froid, impassible. Pas un mot. Pas un geste. Rien qui trahisse la moindre faiblesse.
Je suis venu ici pour une seule chose : oublier , m’oublier , l’effacer.
Elle avance, dégageant une assurance parfaite, conquérante, le regard droit, franc, perçant. Elle connaît son rôle. Elle a vu mille hommes comme moi. Elle ne cherche ni pitié ni connexion. Juste le paiement et l’obscurité.
Je ferme les yeux, inspire longuement. Je cherche la faille, je cherche la paix, mais ce chaos incessant tourbillonne en moi, me déchire. Elle s’approche, délicate, presque silencieuse. Je sens sa respiration, son souffle chaud qui vient caresser ma peau.
Mes paupières s’ouvrent.
Elle est là, à portée de main, de chair, de désir.
Je la saisis avec une urgence désespérée, brutale. Pas de tendresse, pas de douceur. Juste la faim crue d’un homme qui veut s’oublier, qui veut s’engloutir dans un autre corps, dans un autre souffle.
Ses mains glissent sur moi, apprivoisent mes muscles tendus, mes lignes dures, comme si elle voulait lire l’homme derrière la façade. Mais je ne suis qu’une armure, un bloc de glace et de feu.
Je la repousse contre le mur, ses ongles tracent des sillons légers sur ma peau nue, tandis que mes lèvres s’égarent, mordent, brûlent, cherchent à faire taire la voix intérieure qui crie son nom , mais je ne l'embrasse pas ...non !
La pièce résonne de nos souffles haletants, de ces soupirs rauques, de ces corps qui s’empoignent dans un chaos parfait.
Je sens mon corps répondre malgré moi, une alchimie brutale qui me dépasse, qui me consume.
Ses doigts s’égarent, explorent, réveillent des frissons que j’avais enfouis loin, trop loin.
Mais dans chaque geste, dans chaque mouvement, dans chaque grognement étouffé, il y a ce vide qui hurle au fond de moi.
Ce vide qu’elle ne pourra jamais combler.
Elle me rend fou, m’épuise, me déchire.
Je me perds dans ses courbes, dans son odeur, dans la brûlure de sa peau contre la mienne.
Je veux que ça s’arrête. Je veux que ça continue.
Le paradoxe me dévore.
Je m’abandonne à cette danse sauvage, à cette tempête de chair et de douleur.
Le temps suspend son vol.
Le monde s’efface.
Je ne suis plus que lui, et l’ombre qui vacille en moi.
Quand la nuit s’achève, que ses doigts quittent enfin ma peau, que sa silhouette disparaît dans l’obscurité, il ne reste plus que moi.
Seul , brûlant , fou.
Et incapable d’oublier.
LiviaLa voiture glisse dans la nuit, ses phares déchirant l’obscurité, et je sens chaque vibration de Marko contre moi, cette présence massive, dangereuse et pourtant rassurante, qui m’absorbe entière. La tension de la soirée, le tumulte des regards, les éclats glacés de mon père, tout ce théâtre de pouvoir, n’a fait qu’attiser le feu sous ma peau, un feu qui pulse, qui brûle, qui réclame Marko avec une urgence qui me surprend moi-même.Quand nous franchissons le portail, la maison nous engloutit dans son silence luxueux, ses murs chargés de secrets et de désirs. Marko ne dit rien, mais son aura me guide, sa main dans la mienne, ferme, possessive, suffisant à faire frissonner mon échine. L’ascenseur nous élève comme dans un souffle suspendu, et je sens mes jambes fléchir à la seule anticipation de ce qui m’attend.La chambre est vaste, enveloppante, saturée de lumière douce qui caresse la peau. L’odeur du bois, du cuir, et surtout de lui, me submerge avant même que ses lèvres ne trou
Livia Les verres tintent, les murmures s’étouffent dans des éclats de rire trop polis, les serveurs glissent comme des ombres entre les invités, mais derrière cette façade de luxe et de diplomatie, tout est tension, tout est calcul, tout est menace retenue. Je sens Marko près de moi, immobile, impassible, comme un roc planté au milieu de cette mer d’apparences. Ses yeux balaient la salle, évaluent, anticipent. Puis son regard se pose sur mon père.Je reconnais ce moment précis où le jeu commence.Mon père tente de garder contenance. Son costume parfait, sa posture droite, sa mâchoire crispée trahissent à peine le tumulte qui l’habite. Il ne comprend pas comment je peux être là, au bras de Marko, l’homme qu’il a juré d’anéantir, celui qui a réduit en poussière des années de deals, d’alliances, d’empire. Il veut s’approcher, mais quelque chose le retient , peut-être cette aura glaciale que Marko dégage sans un mot, peut-être le fait que je ne le regarde plus comme sa fille, mais comme
Livia Le cuir contre mes jambes, le parfum épicé et chaud de Marko, le moteur ronronnant comme une bête prête à bondir, chaque sensation me rappelle que ce soir, rien ne sera comme avant, que la peur et le désir vont se mêler à un jeu de pouvoir qui pourrait me consumer, et pourtant, au lieu de trembler, je sens quelque chose en moi se tendre, se préparer à affronter ce monde de prédateurs où je n’étais qu’une proie il y a quelques heures encore.— Tiens-toi droite, murmure Marko, sa voix caresse et pèse, et je redresse mes épaules comme si ma colonne vertébrale pouvait devenir une arme, je relève le menton, j’apprends à marcher avec la gravité de mes intentions, à m’inscrire dans l’espace avec assurance, et chaque pas que nous faisons vers l’entrée de l’hôtel me rapproche de l’instant où je vais affronter mon père et lui montrer qu’il n’a plus aucun contrôle sur moi.La limousine s’arrête devant un hôtel privé, immense, chaque lumière dorée, chaque reflet sur le sol poli, projette un
MARKOElle entre dans la chambre comme on entre dans une pièce déjà meublée de souvenirs qu'on n'a pas encore faits, et quelque chose se serre en moi, une attention aiguë, parce que tout à l'heure elle était vêtue pour provoquer et maintenant elle revient à elle-même, frêle et vraie, et j'aime cette vérité qui tremble, je l'observe sans dissimulation, je laisse mes yeux apprendre chaque repli de sa peau comme on lit une partition, et elle, embarrassée, baisse le regard comme si mes yeux pouvaient la dévorer et la remettre en place à la fois, je me lève sans bruit, je veux que le monde se plie à notre rythme, je veux que ce matin ne connaisse que nous deux et la lente montée d'un désir qui se joue en dehors du temps.— Va te laver, dis-je doucement, et ma voix n'a rien d'un ordre tranchant, c'est une invitation offerte avec la certitude qu'elle l'acceptera, elle hoche la tête, incertaine encore, comme si le geste de se défaire de ses vêtements était aussi un geste de se découvrir devan
MARKOJe me réveille avec le goût de son aveu collé au palais, comme un vin capiteux qu'on n'oublie pas, et la première pensée qui fend mon cerveau n'est pas la vengeance en elle-même, mais l'image de Livia à mes côtés lors de la soirée où tout commencera, sa présence comme une lame immobile braquée contre son père, sa beauté réglée pour déranger, pour séduire et pour tuer sans bruit, je souris dans l'ombre de mon oreiller en sentant la promesse de demain se gonfler comme un coup porté au thorax de l'adversaire.Le matin s'étire au-dehors sans savoir qu'ici l'horloge avance plus vite, je suis chez moi, je sens les murs humides de secrets, et je laisse mes doigts glisser sur la table comme on caresse un plan déjà tracé, chaque détail pris en compte, il y a des choses qui doivent être parfaites : le mot prononcé au bon moment, le silence qui suit, le regard que l'on adresse au bon témoin, et surtout elle, Livia, transformée sans contrainte, pas une marionnette mais une arme subtile, un
LIVIAIl s'arrête près de moi, si près que je sens son souffle sur ma joue, une chaleur douce qui efface presque l'acier de ses yeux, il me regarde avec une douceur improbable, comme si tout le reste , la haine héritée, les trahisons, les murs qu'on a élevés entre nos familles , n'était qu'une rumeur lointaine qui ne l'atteint plus, et dans ce silence chargé, sa main vient contre ma joue, lente, précise, comme pour cartographier ma peau et s'assurer qu'elle est réelle, je me laisse faire parce que ses doigts portent moins de menace que d'attention, parce que dans ce geste il y a une promesse muette qui me désarme davantage que n'importe quelle parole.— Livia, dit-il doucement, les mots tombent et roulent en moi comme des pierres précieuses qu'on découvre au fond d'un fleuve, je sais qui tu es, et cela ne change rien à ce que je ressens.Ce qu'il dit prend la place d'un ouragan et pourtant c'est une caresse, une main qui retire un voile, je sens mes défenses chanceler, non pas parce q